Le 8 mai est la date d’anniversaire de la victoire contre les forces fascistes et de la fin de la dévastatrice deuxième guerre mondiale… N’oublions pas ! L’humanité a une dette éternelle envers tous les hommes et toutes les femmes ayant combattu avec héroïsme pour la liberté et défait les hordes fascistes.
Le plus minime souci de rigueur impose de mettre un point d’honneur sur le rôle qu’ont joué, dans cette guerre, les peuples soviétiques et chinois, rôle qui, pour des raisons purement idéologiques, a été fortement occulté dans nos manuels d’histoire. Comme l’a écrit le célèbre Geoffrey Roberts, l’histoire est une sorte de tribunal. En tant que jurés, il nous incombe « de reprendre toutes les preuves à notre disposition, y compris celles de la défense, et de voir l’ensemble du tableau ».
Le lancement de l’invasion nazie de l’Union soviétique a eu lieu le 22 juin 1941, avec une armée forte de plus de cinq millions d’hommes (elle était considérée comme la plus puissante du monde d’alors). Rappelons que la raison d’être de l’avènement des nazis était précisément la destruction du socialisme soviétique. Les espoirs de la bourgeoisie du monde entier quant à cette invasion étaient immenses. Ainsi par exemple, Hugo Stinnes, industriel et homme politique allemand d’importance, déclara en 1923 : « Il faut trouver un dictateur qui aurait le pouvoir de faire tout ce qui est nécessaire. Un tel homme doit parler la langue du peuple et être lui-même un civil ; nous avons un tel homme. […]. Sa venue signifiera avant tout le début d’un combat contre le communisme ».
Au début de l’invasion, Goebbels, l’un des dirigeants les plus influents du régime nazi, écrivait dans son journal « Nous sommes devant une marche triomphale sans précédents […]. Je considère la force militaire des Russes très basse, plus basse encore que ne la considère le Führer. S’il y avait et s’il y a une action sûre, c’est celle-ci. » (lire notamment, sur l’analyse du journal de Goebbels, l’intéressante étude de D. Losurdo). Hitler, quant à lui, qualifiait l’armée soviétique de « plaisanterie ».
Mais le 2 juillet déjà, Goebbels notait dans son journal ceci : « Dans l’ensemble, on se bat très durement et très obstinément. On ne peut en aucune façon parler de promenade. Le régime rouge a mobilisé le peuple. »
Le 24 juillet : « Nous ne pouvons avoir aucun doute sur le fait que le régime bolchévique, qui existe depuis presque un quart de siècle, a laissé de profondes traces chez les peuples d’Union soviétique […]. Il serait donc juste de montrer avec une grande clarté, devant le peuple allemand, la dureté de la lutte qui se déroule à l’Est. Il faut dire à la nation que cette opération est très difficile, mais que nous pouvons la dépasser et que nous la dépasserons. »
Le 1er août : « Au quartier général du Führer […] on admet ouvertement aussi que nous nous sommes un peu trompés dans l’évaluation de la force militaire soviétique. ».
Le 19 août : « Le Führer est très irrité contre lui-même sur le fait de s’être laissé à ce point tromper sur le potentiel des bolcheviques […]. Pour ce qui concerne l’Ouest, le Führer n’a aucun motif de préoccupation. […] Avec notre rigueur et notre objectivité à nous, Allemands, nous avons toujours surévalué l’ennemi, à l’exception, dans ce cas, des bolcheviques. […] Il était quasiment impossible à nos hommes de confiance et à nos espions de pénétrer à l’intérieur de l’Union soviétique. Ceux-ci ne pouvaient pas se faire une idée précise. Les bolcheviques se sont directement engagés à nous tendre un piège. Nous n’avons eu aucune idée de toute une série d’armes qu’ils possédaient, surtout pour les armes lourdes. Exactement le contraire de ce qui s’est passé en France, où nous savions pratiquement tout et ne pouvions en aucune manière être surpris. »
Le 16 septembre : « Nous avons calculé le potentiel des bolcheviques de façon totalement erronée. »
Hitler, le 29 novembre 1941, s’arrachant les cheveux face au mur soviétique, écrivait ceci : « Comment est-il possible qu’un peuple aussi primitif puisse atteindre de tels résultats techniques en si peu de temps ? ». Le 26 août 1942 : « En ce qui concerne la Russie, il est incontestable que Staline a élevé le niveau de vie. Le peuple russe ne souffrait pas de faim. Dans l’ensemble, il convient de reconnaitre : des usines de l’importance des Hermann Goering Werke [gigantesque complexe métallurgique et sidérurgique de l’Allemagne nazie] ont été construites là où, jusqu’il y a deux ans, n’existaient que des villages inconnus. Nous trouvons des lignes de chemins de fer qui n’étaient pas indiquées sur les cartes. » Hitler mettait ainsi le doigt sur la condition sine qua non de la victoire dans toute guerre : l’état d’esprit des masses…
La résistance des Soviétiques, en ce début d’invasion nazie, a dissipé le mythe de l’invincibilité de l’armée nazie, né durant la campagne en Occident.
Evoquons maintenant la bataille de Stalingrad (s’étendant de juillet 1942 à février 1943). H. Doerr, général allemand, a écrit, à ce propos, ceci : « En 1942, Stalingrad marqua un tournant de la Seconde Guerre mondiale. La bataille de Stalingrad fut pour l’Allemagne la plus lourde défaite de son histoire, pour la Russie ce fut sa plus grande victoire ». Cette bataille fut fondamentale dans la guerre en raison de la position ultra-stratégique de Stalingrad. Le peuple, armé, y a combattu pour chaque maison, chaque parcelle, de la ville. Les usines et les immeubles étaient transformés en forteresses.
Le commandant d’un bataillon de la 6ème armée de Friedrich Paulus, H. Welz, écrivait, concernant les multiples offensives vaines auxquelles il a pris part : « Mais voilà qu’enfin on commence à ressentir du mouvement. Un soldat saute par-dessus le bord du ravin, un soldat allemand. Il revient en courant ! Ce doit être un agent de liaison avec un rapport ! Mais non, en voilà un deuxième, un troisième, un quatrième. Tous rebroussent chemin. Ils sont suivis par quelques sapeurs. Ainsi, les nôtres battent en retraite ! Encore deux-trois minutes et on voit déjà les casques des soldats russes. […] Les Russes approchent maintenant de la position initiale. On déclenche contre eux le même tir en rafale que ce matin. L’avance des Russes cesse… Les lignes se fixent, se figent. Tout est de nouveau comme avant. Comme avant l’attaque, comme hier, comme il y a une semaine ! On croit rêver ! Est-ce que tout ce combat n’a pas été vraiment un rêve ? Cinq bataillons nouveaux sont partis à l’offensive, comme chez nous sur le champ d’exercice. Et qu’en reste-t-il ? La plupart ont été tués, une partie a été blessée, les autres sont battus, battus à plate couture. C’est un lieu ensorcelé ! Quoi que tu fasses pour le prendre, tu te heurtes à du granite. »
Par ailleurs, du côté chinois, il est avéré que si le Japon avait vaincu, il aurait eu la possibilité de lancer un plus grand nombre d’offensives avec de colossales ressources en d’autres lieux. Sans la résistance et la victoire héroïques du peuple chinois, sous la direction d’un solide parti communiste, les pertes en Union soviétique et en Occident auraient été encore plus colossales. Nous leur devons énormément.
Quelques chiffres frappants maintenant. Le peuple soviétique, de tous les peuples du monde, a le plus souffert de la guerre : 23 millions de morts. Ensuite vient le peuple chinois avec près de 20 millions de morts.
Pour rappel, la France compte environ 540.000 morts, le Royaume-Uni, près de 450.000 et les USA près de 420.000.
Geoffrey Roberts, se défendant de prendre position pour le communisme, a conclu ses recherches sur cette période, dont la haute qualité n’est contestée par personne, en affirmant que l’Union soviétique a battu Hitler et « sauvé la démocratie mondiale ». Il est loin d’être le seul.
R. Seth, un historien anglais, a écrit ceci :
Quoi que vous pensiez du communisme, si vous êtes honnête, vous ne pouvez vous empêcher d’admirer les Russes…pour la vaillance, la fermeté et la maitrise avec lesquelles ils ont retenu les Allemands à Stalingrad en 1942, et d’admirer Stalingrad, comme tête de pont, à partir de laquelle ils ont fini par changer le cours de la guerre en leur faveur et en faveur des Alliés occidentaux.
Il est du devoir de tous les progressistes de refuser l’amoindrissement, motivé par des raisons idéologiques, du rôle joué par les peuples soviétiques et chinois. Cette démarche n’implique pas, en retour, d’amoindrir le rôle des autres forces ayant combattu pour la liberté.
Aujourd’hui, on assiste un peu partout dans le monde à une montée des idées et forces fascistes. Organisons-nous et menons la lutte antifasciste !