1. Durant tout l’été, nos chers politiciens ont claironné que non, il n’y aurait pas de pass sanitaire étendu chez nous. Mais voilà, comme chacun pouvait s’en douter, ce n’était que des paroles en l’air : l’accord de coopération de ce 27 septembre permet d’étendre le pass sanitaire – renommé covid safe ticket – à quasiment tous les lieux. Désormais, tout se passe comme s’il n’y avait d’autre choix que le covid safe ticket en tout lieu ou la catastrophe sanitaire. Vous connaissez la recette : pour amener le plus grand nombre à accepter des mesures impopulaires, il faut tant que possible jouer sur les affects, sur les peurs et les sentiments irrationnels.
2. À dater de ce mois d’octobre, la population doit donc se plier à cette mesure si elle ne veut pas être exclue de la vie sociale. Car c’est bien de cela qu’il s’agit. Le covid safe ticket est présenté comme une mesure permettant de récupérer nos libertés, de « revivre ensemble », mais les faits montrent tout le contraire : il constitue une mesure coercitive qui prolonge la restriction des libertés; il contribue à faire encore durer l’« état d’urgence sanitaire », pourtant censé n’être qu’un régime tout à fait temporaire; il met au ban de la vie sociale de larges couches de la population; il prive une foule de personnes de l’accès à nombre de services et activités basiques (et, comme toujours, ce sont les plus précaires qui en pâtissent le plus)… Tant que ce dispositif est d’application, la restriction des libertés de base telles que la liberté d’aller et venir et la liberté de réunion est la règle. En outre, il étend et amplifie d’une façon inédite la surveillance étatique de la population et instaure un climat policier (notamment en déléguant la mission de gendarme aux particuliers, aux petits commerçants, aux travailleurs de l’Horeca, etc.). Les masses sont encore plus fliquées et surveillées dans leurs activités. À n’en pas douter, le pass sanitaire est un outil de contrôle social aussi poussé qu’efficace. Au passage, il constitue un nouvel exemple de la façon dont le pouvoir utilise à ses fins la technologie.
Mais le covid safe ticket ne serait-il pas qu’une simple parenthèse ? Que nenni ! L’expérience l’a enseigné, ce genre de dispositif peut s’inscrire dans la durée, être pérennisé si bien que, progressivement, les mesures « d’exception » s’installent de façon permanente dans l’ordre juridique. De plus, la mise en place de pareilles mesures contribue à banaliser les restrictions de libertés et le recours aux mécanismes autoritaires. Par ailleurs, le pas étant maintenant franchi, qu’est-ce qui demain empêchera nos gouvernants d’appliquer ce dispositif à d’autres circonstances ? Si aujourd’hui on nous refuse l’entrée dans un lieu au motif que l’on est positif ou non vacciné, si aujourd’hui on nous soumet à une surveillance rapprochée au nom de la « sécurité sanitaire », où en sera-t-on demain ? Quels seront les critères appliqués ? Ainsi, il faut bien comprendre que le covid safe ticket, qui servira de précédent (frappé du fameux « effet cliquet » !), ouvre insidieusement de dangereuses portes et de nouvelles fenêtres de tir sur les droits et libertés démocratiques. Il fraye la voie à de nouvelles méthodes coercitives et annonce bien d’autres outils de contrôle social (que l’on pense au « crédit social » en Chine, ce système de surveillance qui synthétise les données d’un citoyen pour déterminer les « crédits sociaux » qu’il mérite). Objectivement, il s’agit bien d’une nouvelle brèche dans les droits et libertés, qui sert les intérêts de la classe dirigeante. Objectivement, ce dispositif s’inscrit, sous l’alibi de la lutte contre la pandémie, dans le glissement autoritaire du pouvoir, dans la tendance à la casse des droits et libertés de la classe ouvrière. Tendance qui ne date pas d’hier et qui ne va pas s’arrêter de sitôt : année après année, les masses sont de plus en plus fliquées, fichées (les données personnelles de la population récoltées et manipulées par l’État s’accumulent), contrôlées, restreintes dans leurs libertés et étouffées dans leurs mouvements par l’État. La bourgeoisie est de plus en plus poussée à se passer des méthodes « ordinaires » et démocratiques pour gouverner ceux qu’elle opprime (voy. sur le sujet : https://www.ruptureetrenouveau.be/2021/09/21/la-loi-pandemie-entrera-bientot-en-vigueur/). Bref, la dynamique est claire : moins de droits et de libertés, plus de contrôle social, plus de dispositifs coercitifs et répressifs.
3. On notera également que, sur le plan formel, pour adopter le pass sanitaire, le gouvernement a eu recours à un énième arrêté ministériel, anticipant un ensemble de procédures parlementaires . Or il s’agit là d’une mesure extrêmement attentatoire aux droits et libertés. On savait depuis belle lurette que les processus parlementaires ne sont que farces et hypocrisie. Mais, depuis 2020, c’est extrêmement limpide : l’exécutif ne cherche même plus à « faire semblant ».
4. Un autre point qui mérite l’attention, c’est le fait que les personnes usant de leur droit à ne pas se faire vacciner se retrouvent désormais ouvertement discriminées, stigmatisées et pointées du doigt comme boucs émissaires. On a désormais un clivage artificiel supplémentaire : le clivage entre vaccinés (“camp du bien”) – non-vaccinés (“camp du mal”). Il faut dire que la bourgeoisie se régale des divisions et tensions parmi « ceux d’en bas ». On sait par exemple que, déjà avant l’instauration du pass sanitaire, certains patrons ont séparé leurs salariés en fonction de leur statut vaccinal (alors même que c’est illégal).
5. En s’opposant au pass sanitaire, il ne s’agit pas de s’opposer au vaccin, outil dans la lutte contre la pandémie, ou à toute mesure sanitaire. Il s’agit plutôt de s’y opposer en tant que mécanisme politique coercitif qui porte atteinte durablement aux droits et libertés démocratiques et, partant, aux intérêts des travailleurs ; moins ceux-ci ont de libertés, même formelles, moins ils disposent d’espace pour s’organiser, participer à la vie politique et lutter (rappelons ici que la destruction des libertés politiques et démocratiques des travailleurs va de pair avec la destruction de leurs droits et acquis proprement sociaux; c’est tout un package!). On insiste donc : des mesures telles que le pass sanitaire ne peuvent en aucun cas être vues comme anodines, neutres politiquement ! Elles sont dangereuses et doivent être combattues avec force.
Certains « marxistes » acceptent le pass sanitaire sous prétexte qu’il faut lutter contre la pandémie. Mais cela revient à accepter tout ce qu’il implique sur le plan politique pour la classe ouvrière et l’ensemble de la population laborieuse. C’est ne pas saisir que, si le coronavirus est certes toujours parmi nous, les parasites capitalistes représentent un danger infiniment plus grand pour le peuple travailleur. C’est oublier que, depuis 2020, les gouvernants s’autorisent pratiquement tout et n’importe quoi au nom de la « lutte contre la pandémie » (et n’hésitant pas pour ce faire à manipuler les affects et à instiller la peur parmi la population) et que leur état « d’urgence sanitaire » a ouvert de dangereuses boîtes de Pandore. C’est enfin perdre de vue que les dernières années et décennies sont déjà lourdes en atteintes aux droits et libertés des travailleurs.
Selon ces marxistes de chambre, il faudrait d’abord tous se faire vacciner pour ensuite reprendre la lutte. Donc, si, demain, la bourgeoisie paralyse de nouveau les droits et libertés pour faire face à une menace terroriste, faudra-t-il appeler à « attendre » que le calme revienne pour reprendre la lutte ? À ce train, on peut encore attendre cent ans avant de proclamer la « reprise de la lutte ». Il est clair que c’est là une position qui revient à soumettre au bon vouloir de la bourgeoisie et, en pratique, à renoncer à toute lutte. Du reste, les masses n’ont que faire des atermoiements des révolutionnaires de salon. Il suffit d’observer la tournure des événements en France : tout l’été durant, le pays a été secoué par des mobilisations massives contre le pass sanitaire.
Marchons pour nos droits et libertés, marchons contre le covid safe ticket, contre le gouvernement et toute cette oligarchie capitaliste qui nous étouffent !
1 commentaire
Les prix de l’énergie ont atteint des sommets. Le coût de la vie ne fait qu’augmenter. – Rupture et Renouveau · 26 février 2024 à 18:11
[…] et liberticides (lire notamment : https://www.ruptureetrenouveau.be/…/la-vivaldi-a…/ ; https://www.ruptureetrenouveau.be/…/mobilisons-nous…/ […]
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