Un spectre hante l’Europe : le spectre du communisme. Toutes les puissances de la vieille Europe se sont unies en une Sainte-Alliance pour traquer ce spectre : le pape et le tsar, Metternich et Guizot [1], les radicaux de France et les policiers d’Allemagne.

Quelle est l’opposition qui n’a pas été accusée de communisme par ses adversaires au pouvoir ? Quelle est l’opposition qui, à son tour, n’a pas renvoyé à ses adversaires de droite ou de gauche l’épithète infamante de communiste ?

Il en résulte un double enseignement.

Déjà le communisme est reconnu comme une puissance par toutes les puissances d’Europe.

Il est grand temps que les communistes exposent à la face du monde entier, leurs conceptions, leurs buts et leurs tendances; qu’ils opposent au conte du spectre communiste un manifeste du Parti lui-même.

C’est à cette fin que des communistes de diverses nationalités se sont réunis à Londres et ont rédigé le Manifeste suivant, qui est publié en anglais, français, allemand, italien, flamand et danois.

Le Manifeste du Parti Communiste


[1] Pie IX, élu pape en 1846, passait pour “un libéral”, mais il n’était pas moins hostile au socialisme que le tsar Nicolas I° qui, dès avant la révolution de 1848, joua en Europe le rôle de gendarme. Juste à ce moment-là, il y eut lieu un rapprochement entre Metternich, chancelier de l’Empire autrichien et chef reconnu de toute la réaction européenne, et Guizot, historien éminent et ministre français idéologue de la grande bourgeoisie financière et industrielle et ennemi intransigeant du prolétariat. A la demande du gouvernement prussien, Guizot expulsa Marx de Paris. La police allemande persécutait les communistes non seulement en Allemagne mais aussi en France, en Belgique et même en Suisse, s’efforçant par tous les moyens d’entraver leur propagande. (N.R.)