M. Proudhon a le malheur d’être singulièrement méconnu en Europe. En France, il a le droit d’être mauvais économiste, parce qu’il passe pour être bon philosophe allemand. En Allemagne, il a le droit d’être mauvais philosophe, parce qu’il passe pour être économiste français des plus forts. Nous, en notre qualité d’Allemand et d’économiste à la fois, nous avons voulu protester contre cette double erreur.
Le lecteur comprendra que, dans ce travail ingrat, il nous a fallu souvent abandonner la critique de M. Proudhon pour faire celle de la philosophie allemande, et donner en même temps des aperçus sur l’économie politique.
Karl Marx.
Bruxelles, le 15 juin 1847.
L’ouvrage de M. Proudhon n’est pas tout simplement un traité d’économie politique, un livre ordinaire, c’est une Bible : “ Mystères ”, “ Secrets arrachés au sein de Dieu ”, “ Révélations ”, rien n’y manque. Mais comme, de nos jours, les prophètes sont discutés plus consciencieusement que les auteurs profanes, il faut bien que le lecteur se résigne à passer avec nous par l’érudition aride et ténébreuse de la “ genèse ”, pour s’élever plus tard avec M. Proudhon dans les régions éthérées et fécondes du supra-socialisme. (Voir Proudhon: Philosophie de la misère, prologue, p. III, ligne 20.)
- Avant-propos
- Préfaces de Friedrich Engels
- Misère de la philosophie
- I. Une découverte scientifique
- II. La métaphysique de l’économie politique
- Annexes
Note de l’édition de 1968
Pour l’établissement de notre texte, nous nous sommes conformés à l’édition dite MEGA (Marx-Engels Gesammtausgabe) Erste Abteilung, Band VI, Berlin 1932, qui reproduit l’édition originale, Paris-Bruxelles, 1847. Toutefois nous avons tenu compte des quelques corrections et notes apportées par Friedrich Engels pour 1° édition allemande de 1885 et que l’on retrouve dans la réédition française de 1896.
Marx avait écrit Misère de la philosophie directement en français : il avait une connaissance étendue et précise de notre langue. Néanmoins, par-ci et par là, le texte est incorrect. Sans verser dans le pédantisme, et tout en respectant la formulation de l’auteur, nous avons cru bon de donner en note, en quelques endroits, une version plus conforme à l’usage.